Paris by night. Deux amis de longue date se rencontrent après une longue séparation. Ils font la fête et déambulent dans la ville en faisant les cons. Pour rentrer en banlieue, ils prennent un taxi mais ne paient pas la course. Le chauffeur va les poursuivre jusqu’à la fin.
Night Fare débute comme un énième slasher où un tueur fou et invincible se paye une à une des victimes jetables. Mais plusieurs choses élèvent le film au-dessus de la série B prévisible. A mon goût, les deux points forts du film sont les décors urbains nocturnes et la bagnole, une chrysler 300C. La voiture, c’est celle qui a déjà marqué les esprits dans Drive de Nicolas Winding Refn. Avec sa calandre reconnaissable, qui évoque la gueule d’un squale, avec ses vitres sur-teintées (bientôt illégales) et sa forme aérodynamique, le véhicule possède lui-même une esthétique de prédateur. Physiquement, le chauffeur a l’air un peu moins agressif; du moins au départ. Vêtu d’un anorak et d’une casquette qui cache son regard, le type a l’air somme toute normal. Enfin, façon de parler, car dès que des voyous ou des flics essaient de le neutraliser, ça solde à chaque fois par un échec, occasionnellement sanglant. Malgré une mise en scène fétichiste sur la bagnole, celle-ci ne sert toutefois que d’outil efficace pour le tueur.
Les décors, c’est donc la banlieue anonyme de nuit, car le film se déroule en gros sur une seule nuit. Les rues sont désertes et plus rien ne bouge. Dernière cigarette. Et l’on parcourt des endroits un peu glauques comme des bureaux fermés, des tunnels, des immeubles aux fenêtres noire. Cet aspect « tertiaire sans activité » est un peu flippant, évoquant presque un post-apo urbain. Et puis il y a surtout l’éclairage, au néon et au sodium, plongeant le film dans une atmosphère froide et métallique. Absolument aucun lieu n’a l’air convivial ou accueillant. Cette esthétique des lieux est peut-être encore plus effrayante que le tueur et son veau cylindré.
Vers la fin du film, outre le dénouement du passé des deux personnages principaux, Julien Séri choisit de dévier complètement du classicisme habituel et emmène son film vers des contrées plus lointaines. Le twist (qui n’est pas un retournement de situation mais plutôt un élargissement de l’intrigue) est amené grâce à un dessin-animé tout à fait audacieux. En général, dans les slashers, le suspense tient aux motivations du tueur. Pourquoi fait-il un massacre ? Par pur plaisir, pour la thune, pour se venger des enfants qui l’ont noyé quand il était petit. Bref. Ici, le motif est assez original et je préfère laisser la surprise pour ceux qui voudront être, justement, surpris. Evidemment, il ne faudra pas être trop regardant sur les deux personnages principaux, deux hommes un peu antipathiques pour lesquels il est assez difficile d’éprouver une quelconque empathie. Leur passé commun et le triangle sont un peu tirés en longueur et viennent parasiter quelque peu l’efficacité du film.
Night Fare n’a pas bénéficié des habituelles aides au financement. Une partie des fonds a même été levée grâce à une campagne de financement participatif. Nous avons donc là un film réalisé de manière artisanale. On sent bien une certaine liberté dans le ton, le film passant allègrement du thriller classique, au déferlement gore, puis à quelque chose de plus ambitieux. Le making-of et les entretiens sur le blu-ray révèlent un travail acharné, ce qui a grandement aidé à la réussite d’un film au budget que l’on devine étriqué.
Sortie en blu-ray le 17 mai 2016 chez Universal. Réalisé par Julien Séri. Avec Avec Fanny VALETTE, Jonathan HOWARD, Jonathan DEMURGER, Jess LIAUDIN et Edouard MONTOUTE .
Bonus :
– “On part en vacances ou on fait un film ?”
– Making of
– Commentaire audio du réalisateur
– Avant-première au Max Linder Panorama
– Les origines expliquées
– Les Ululeurs
– Bandes-annonces
– Bonus caché