Beaucoup de choses ont déjà été dites sur le dernier film de Rob Zombie. Après s’être fait allumer dans divers festivals (Sitges, Toronto), le musicien-cinéaste américain qui s’était pourtant bâti une belle réputation avec les excellents House of 1000 Corpses et The Devil’s Rejects semble peu à peu abandonné par ses fans depuis ses remakes d’Halloween. Ceci suscite une question intéressante : qu’attendons-nous d’un film de Rob Zombie ? De l’hémoglobine ? Des personnages outranciers ? Une B.O. qui défonce ? Et plus intéressant encore : quel style narratif attendons-nous ?
Jusqu’à présent, Rob Zombie avait plus ou moins respecté les codes narratifs hollywoodiens, mais il les détournait en s’intéressant à des personnages obscurs et malsains, ce qui rendait ses films particulièrement surprenants. The Lords of Salem est un entre-deux. D’un côté, nous avons droit à un style narratif classique et de l’autre, un style plus expérimental.
Pour résumer tout de même le film, il s’intéresse au personnage d’Heidi, DJ d’une station radio dans la ville de Salem. Un jour, elle reçoit une mystérieuse boite en bois contenant un vinyle de la part de ce qui semble être un groupe appelé « The Lords ». Elle décide de le passer à l’antenne et découvre une musique particulièrement étrange et malsaine qui lui envoi des flashbacks traumatisants. Des flashbacks en rapport avec les Sorcières de Salem, exécutées des siècles auparavant, mais qui avaient jurées de revenir se venger un jour…
Enormément influencé par Shining (ou Kubrick en général), Haxän, Polanski, Jodorowsky ou Gaspar Noé, The Lords of Salem démarre avec une première heure empruntant un style narratif classique. Seulement, il s’agit de beaucoup de bavardage pour ne pas raconter grand-chose. Cela dit, une atmosphère étrange, inquiétante et réussie est mise en place grâce à une réalisation et une bande sonore qui n’égalent peut-être pas ses influences, mais qui leur rendent hommage avec une classe indéniable. La dernière demi-heure du film plonge dans un univers plus expérimental et offre des images souvent hallucinantes et délicieusement psychédéliques. Cette dernière partie fait d’ailleurs penser à la fin de 2001 l’Odyssée de l’espace. « Penser », seulement. En effet, elle est entrecoupée de passages narrativement classiques qui tentent de poursuivre l’histoire que Rob Zombie avait mise en place au départ. Mais encore une fois, il s’agit de beaucoup de blabla pour ne pas raconter grand-chose. Ce qui créé un très gros problème de rythme.
Rob Zombie semble assumer pleinement ni la dimension classique de son film, ni la dimension expérimentale ; à vrai dire, on a l’impression qu’il ne sait pas exactement ce qu’il fait. On ressent chez Rob Zombie un désir à vouloir se détacher du cinéma classique pour se rapprocher de quelque chose de différent, mais lorsqu’il tente de faire ce quelque chose de différent, on ressent aussitôt une pénible retenue ; Rob Zombie n’a pas encore réussi à prendre suffisamment de recul avec ses remakes d’Halloween dans lesquels le désir de proposer quelque chose d’original était déjà bien présent. Désir malheureusement ralenti par les studios, mais aussi par des fans hardcore du film de Carpenter qui se plaignaient soit du fait qu’il s’éloignait du film original, soit du fait qu’il s’en rapprochait trop.
The Lords of Salem est le film d’un cinéaste qui a le cul entre deux chaises. Soit ça va le motiver à revenir vers une forme plus classique, soit il s’agit d’un nouveau départ. Rob Zombie a encore beaucoup de films surprenants devant lui. Et même s’il reste très inégal et brouillon, The Lords of Salem en est un grâce à quelques séquences frissonnantes brillamment réalisées démontrant parfaitement les talents de son auteur. Si ce DTV déguisé d’Insidious 2 (dont les producteurs sont les mêmes que The Lords of Salem) a pu sortir en salle, il est tout de même très regrettable de voir celui-ci finir directement dans les bacs chez nous.
En parlant de ça, le dvd édité par Sevent Sept ne propose malheureusement aucun bonus à part quelques bandes-annonces en VF.
Mouais à moitié convaincu. Entre Ken Russell et les bisseries italiennes des années 70 style Nu pour satan de luigi Batzella ou the reincarnation of isabel de Polselli, tous deux avec la divine Rita Calderoni.