Roy Ward Baker demeure incontestablement l’un des meilleurs artisans du cinéma de genre britannique. Son nom au générique d’un film de la Hammer est d’emblée un gage de qualité. Aux côtés de Terence Fisher, Val Guest et John Gilling, il reste l’un des plus illustres représentants de la firme crée par Enrique Carreras.
Roy Ward Baker a toujours insufflé une folie, une démesure baroque, une violence graphique faisant parfois défaut à d’autres productions plus rigides de la Hammer. Personne n’oubliera Les monstres de l’espace, délirant épisode des aventures du Docteur Quatermass ou encore l’ambigü Docteur Jekyll and Sister Hyde qui, mine de rien, distillait une pertinente réflexion sur l’identité sexuelle.
Dans les années 70, la Hammer connaît par ailleurs une grave crise financière et artistique. Le cinéma d’horreur évolue. Les attentes des spectateurs ne sont plus les mêmes. Le succès surprise de La nuit des morts vivants change la donne. Le cinéma gothique semble dépassé. L’horreur prend racine dans un contexte contemporain, creusant un sillon, par allégorie et métaphore, dans une idéologie sociale et politique. Dans ce contexte, les productions Hammer des années 70 vont tenter, souvent en vain, de moderniser leur vision un brun désuète du fantastique, plus suggestif que graphique, et surtout plus conservatrice que progressiste. Mais la sauce ne marche pas toujours à quelques exceptions près. The Vampire Lovers, proposé généreusement ( ?) avec le magazine Mad movies du mois de novembre, compte parmi les dernières grandes réussites de la Hammer.
Porté par un script rigoureux et captivant, d’après une nouvelle de Sheridan Le Fanu, The Vampire lovers est un vénéneux film de vampire, troublant et envoûtant. Dès le prologue, Baker installe une ambiance gothique du plus bel effet. Une forme enveloppée dans un drap s’extirpe d’une tombe sous le regard effrayé d’un châtelain qui immerge le spectateur dans une atmosphère sensuelle et hypnotique. S’en suit une décapitation réussie qui nous rappelle que nous sommes bien dans un film d’horreur agressif et transgressif.
Roy War Baker jongle entre classicisme et modernisme, bouscule les codes du genre tout en inscrivant son récit dans une forme conventionnelle mais élégante. Il dresse le portrait audacieux d’une vampire qui séduit ses victimes au sens littéral du terme. L’érotisme saphique dans un contexte aussi puritain que la période victorienne révèle l’audace qui anime les auteurs de ce film ambigu. Le personnage de Carmilla n’est pas l’incarnation du mal, mais une sorte de morte vivante qui porterait le poids d’une malédiction. Plusieurs séquences semble nous orienter vers l’hypothèse qu’elle souffre, qu’elle est elle-même manipulée par le comte Karnstein, que l’on aperçoit brièvement. En dépit de ce qu’il prétend dans une vieille interview à Mad Movies, Roy Ward Baker semble très à l’aise avec les séquences érotiques, fortement aidé il est vrai par la plastique divine de ses comédiennes, à commencer par la hongroise Ingrid Pitt. Elle possède un regard mélancolique et envoûtant, des yeux magnifiques et hypnotiques. Dans ses tenues vestimentaires volontairement clinquantes (vert, bleu ou rouge), elle est le centre attractif du film. Sa voix grave et suave, en dépit d’un anglais approximatif, fait l’effet d’une charmeuse de serpent. Ni complaisant ni graveleux, la nudité naturelle des actrices est un régal pour les yeux. Elle est même un élément phare de la progression dramatique et non un simple artefact décoratif. Bizarement, cette excellent travail d’orfèvre ne connut pas l’honneur d’une sortie en salles, à contrario de ses deux suites, pourtant inférieures, Lust for the devils et Twins of Dracula. A redécouvrir
(GB-1970) de Roy Ward Baker avec Ingrid Pitt, Peter Cushing, George Cole, Madeline Smith
Audio : Anglais (mono). Sous-titres: Français. Format : 1 :85. Durée: 91 mn.
Edition Madmovies /Sidonis
C’est un de mes films cultes !!! Il est magnifique, envoutant. Ingrid est à tomber. J’aurai du m’acheter le Mad…