Lors du confinement dû au covid, trois femmes se débattent avec les contraintes. Mado est une mère de famille qui doit subir les excès hygiénistes de son mari. Mili est une jeune femme en couple qui ne peut pas faire le deuil de sa mère de cœur. Enfin, Baza voit ses projets professionnels anéantis. Lorsqu’elles peuvent enfin sortir, les trois amies partent en week-end dans une vieille maison de campagne.
Alors que les restrictions sont levées, quelle bonne idée de se replonger dans l’atmosphère anxiogène du confinement, avec tout ce que cela suppose de comportements paranoïaques et de liens humains dégradés. La réalisatrice fait un état des lieux de cette solitude forcée où chacun devient un petit peu fou et se retrouve face à ses démons. Cependant, cette période ne constitue heureusement que le point de départ d’une aventure plus grande et nous partons bientôt en voyage avec le trio féminin pour un bol d’air en pleine nature.
Premier long-métrage de la réalisatrice, le film aborde frontalement ce qu’a provoqué le confinement chez bon nombre d’entre nous : se retrouver face à soi-même et être obligé de se poser des questions existentielles, de remettre en cause ses choix de vie.
Malgré des moyens limités, le film est solide grâce à la crédibilité et au naturel des actrices. La sororité du trio d’actrices fonctionne de manière très fluide. Et c’est bien cette communion entre femmes qui est célébrée dans le récit. Belladones n’est pas un pamphlet déprimant et étouffant mais une œuvre exaltante et libératrice. Ce moment entre filles est l’occasion de franches rigolades mais c’est aussi un examen de conscience. Et se confronter à soi-même n’est pas forcément une partie de plaisir. Ainsi le film joue avec nos nerfs, passant d’une douce candeur à des moments glaçants. Il mélange astucieusement les genres, allant de la chronique sociale à la comédie, du film philosophique au film fantastique. Et comble de bonheur, il se termine sur une très belle scène de sabbat, où les protagonistes se livrent autant à une danse qu’à une transe sur fond de bruits gutturaux. Tout l’aspect intellectuel et rationnel laisse alors place à une poésie brute et animale venue d’un autre temps.
La genèse du film fait écho à ce que vivent les trois personnages. Alors que le monde de la culture est en pause forcée, la réalisatrice Sophie Tavert Macian emmagasine de l’énergie et capitalise sur cette période. Le confinement produit aussi en elle une remise en question. Elle décide alors d’injecter dans son projet de film l’argent destiné à des travaux immobiliers. Film indépendant et autoproduit, Belladones est une réussite dont la bonne idée consiste à confronter l’archétype de la sorcière avec notre monde moderne. Il offre une nouvelle illustration de cette figure mythique, symbole intemporel de la femme libre et émancipée.
Le film sera projeté au cinéma Le St André des Arts, dans le cadre du cycle Découvertes de Dobrila Diamantis ( 30, rue Saint-André des Arts – 75006 Paris)
Plus d’infos ici : http://cinesaintandre.fr/fr/cycles/cycle-decouvertes/