Il y a 20 ans, je publiais ma première chronique dans Cinetrange qui était encore un fanzine papier (et s’appelait d’ailleurs Cinéscope) : une critique du Baise-moi de Virginie Despentes. Jérôme était jeune et svelte, alors, j’étais quant à moi imberbe avec de belles boucles blondes. En souvenir de ces temps bénis, j’entame ce mois un marathon de 20 films en 20 jours, chacun critiqués en 1000 signes. À venir sur le site, & dans la nouvelle par email du mois.
The Hauting de Robert Wise (1963) est un film de maison hanté à la fois séminal et sénile. Il fout les chocottes à base de décors surchargés, plans alambiqués, miroirs – tout un bazar gothique flamboyant annonçant le baroque du giallo. Les scènes les plus fortes reposent sur le son et le montage, ni effets, ni sang, ni monstre. Les actrices sont au poil, comme les dialogues pleins de wit et de double sens dans la tradition hollywoodienne d’après-guerre. Le fond est ultra puritain : rien ne peut être montré parce que rien ne peut être dit. L’angoisse qui explose en terreur naît des tabous sexuels imposés à l’héroïne. On a du mal à croire que cette belle maquette en noir & blanc Hammer mixant Hitchcock et Dracula soit sortie la même année que Le Mépris de Godard ou le Muriel de Resnais. Restent de chouettes idées de mise en scène, une dialectique folie vs. surnaturel gérée en voix off, un anthropologue bg à moustache et une team d’investigateurs de l’occulte qui tourne aux dry Martinis.
Le DVD du Mercuriales de Virgil Vernier (2014) a refusé de me délivrer la fin du film : il bloque au milieu de la scène du club de strip-tease. Ce qui est chelou, c’est que celui d’Orléans (2012) m’avait fait le même coup il y a quelques années. Évidemment, c’est introuvable en bib près de chez moi et mon hack-fu ne suffit pas à gratter les torrents. J’ignore donc si VV sait finir ses films – mystère qui rajoute peut-être à la poésie de son taf. Ses œuvres sont des attrape-trucs, qui captent des dialogues, des bouts de vie, des matières révélées par la lumière étrange des instants. C’est du docu SF fantastique au service de la fiction, super beau. Mercuriales campe Bagnolet 2010s : bureaux verticaux, cités, rocades, quick, pc sécurité. J’ai quelques doutes sur le rapport de VV à tout ça, tique sur son obsession pour les seins des jeunes femmes, son côté réal des Beaux Arts dans la France des gilets jaunes. Il met en scène des trucs inédits, épatants, fascinants. À voir (jusqu’au bout).