Reflets dans un oeil mort


A travers son expérience personnelle et notamment la vision de Mondo Cane dans sa jeunesse, Boyd Rice définit les caractéristiques du « mondo » : musique grandiloquente, compilation de scènes documentaires illustrant la cruauté humaine, lieux exotiques.

Les auteurs du livre, Sébastien Gayraud et Maxime Lachaud, proposent une analyse très sérieuse d’un genre qui n’a peut-être jamais été pris au sérieux, justement. Si les films ont créé polémiques et scandales, on élude parfois le principal : les intentions du réalisateur. Il est vrai que les mondo movies jouent sur l’ambigüité de leur nature : faux documentaire ou fiction à base d’images réelles, le spectateur ne sait plus quoi en penser. Divisé en deux, l’ouvrage propose en première partie une vision historique du genre, dressant une chronologie des films et montrant comment les mondo se transformèrent en « films de cannibales ».

Les deux auteurs prennent pour base de leur étude les maîtres étalon du genre : Mondo Cane et Cannibal Holocaust. Le premier est un film italien réalisé par Jacopetti et Prosperi, un anthropologue. Leur biographie et leur profil sont passés en revue pour comprendre ce qui a  pu motivé les deux hommes à accoucher de cette œuvre matricielle. On a droit aussi à la description de leurs films suivants : Adieu Afrique et Négriers, deux brûlots qui provoquèrent des réactions extrêmement violentes partout dans le monde.

Grâce à un savoir encyclopédique, les auteurs nous expliquent comment les prémices du genre étaient déjà présentes dès les débuts du cinéma. Le mondo est en fait une déviance du documentaire ethnographique, mixé avec une évolution glauque du film « sexy » qui présentait à l’époque d’innocents strip-teases de cabaret !

Tout un chapitre est consacré au  mondo américain, plus basé sur l’érotisme et l’humour potache et finissant par évoluer vers les films d’autodéfense et d’exécutions capitales. Un pan de l’ouvrage s’intéresse aux œuvres des frères Castiglioni et leurs reportages sur les horribles rituels des tribus d’Afrique. De fil en aiguille, on arrive doucement au film de cannibales. Ceux-ci s’inspirent des mondo movies sur la forme, évoquant une certaine vérité à travers des images prises sur le vif. Le film le plus détaillé est bien sûr Cannibal Hocolaust, chef d’oeuvre du film de cannibales, réalisé par Ruggero Deodato. Ce film a semé la confusion car il mélange des images réelles de massacre d’animaux, à des images trafiquées à l’aide d’effets gores pour la mort des journalistes, dévorés par les cannibales. On passe rapidement sur les pâles copies, dont le fameux Cannibal Ferox et ses scènes atroces de mutilations.

Sébastien Gayraud et Maxime Lachaud sont parvenus à trouver un bon équilibre entre analyse et description des différents films. Et quand on dit analyse, il ne s’agit pas non plus de se prendre la tête pendant des pages et des pages. C’est concis, précis et argumenté.

La deuxième partie explore les Mondo Movies par la méthode thématique en offrant une analyse transversale des éléments communs à tous les mondo. Ainsi, on s’intéresse d’abord à l’esthétique : comment les différents films montrent-ils la mort et la violence. Les auteurs démontrent que les mondos tentent d’offrir à la vue de tous, ce que l’on essaie habituellement de cacher : le corps humain, ses sécrétions et ses fluides, les mutilations du corps, jusqu’en arriver au tabou ultime : l’exposition d’un cadavre, sommet de l’abject puisque mettant le spectateur « face à la mort ».

Les auteurs s’interrogent, prennent en exemple de nombreux films et parviennent à synthétiser quels étaient les intentions réelles de chaque réalisateur de ces documentaires extrêmes. On découvre alors que si certains ont une démarche sincère, d’autres donnent clairement dans le cinéma d’exploitation racoleur.

Le « film-spectacle » illustre en détails tous les artifices utilisés pour transformer un documentaire en film à sensations, digne des monstres de foire. Un autre chapitre s’intéresse aux moyens de mise en scène et de cadrage.  Les « explora-tueurs » revient sur les ombreuses polémiques entourant certains mondo, notamment des exécutions d’animaux qui auraient eu lieu rien que pour les besoins du film ! Ce chapitre pose la question de l’intégration du documentariste dans le milieu qu’il étudie. Les lieux du mondo (jungle vierge, îles inexplorées) font également l’objet d’un chapitre.

Si le sujet est pointu, l’ouvrage est assez didactique pour intéresser tous les cinéphiles. Et même si certains films sont difficilement trouvables, les auteurs livrent des descriptions qui donnent une bonne idée de ce que l’on peut voir à l’image. De nombreuses photos noir et blanc, mais aussi une série en couleurs, accompagnent le texte.

L’ouvrage est indispensable car il fait l’inventaire de films pas forcément connus. Le genre « mondo » est bien connu des amateurs de gore, de trash et d’horreur mais la liste des œuvres est bien plus longue que ce que l’on pouvait imaginer. Ce pavé de 350 pages, un colossal travail de recherche et d’analyse, semble définitif sur le sujet. On imagine à peine quelle masse de films et d’horreurs a dû être visionnée.

Le livre est édité par Bazaar & Compagnie

A noter que Cannibal Holocaust va sortir chez nous en blu-ray en octobre 2011 et qu’un nouveau montage réalisé par Ruggero Deodato sera disponible également en blu-ray chez nos amis grands bretons. 

 

 

A

 

A travers son expérience personnelle et notamment la vision de Mondo Cane dans sa jeunesse, Boyd Rice définit les caractéristiques du « mondo » : musique grandiloquente, compilation de scènes documentaires illustrant la cruauté humaine, lieux exotiques.

Les auteurs proposent une analyse très sérieuse d’un genre qui n’a peut-être jamais été pris au sérieux justement. Si les films ont créé polémiques et scandales, on élude parfois le principal : les intentions du réalisateur. Il est vrai que les mondo jouent justement sur l’ambigüité de leur nature : faux documentaire, fiction à base d’images réelles, le spectateur ne sait plus quoi en penser.

Ils prennent pour base les maîtres étalon du genre : Mondo Cane et Cannibal Holocaust. Mondo Cane est un film italien réalisé par Jacopetti et Prosperi, un anthropologue. Leur biographie et leur profil sont dressés pour savoir ce qui apu motivé les deux hommes à accoucher de cette œuvre matricielle. Mais on a droit aussi à la description de leurs œuvres postérieurs, Adieu Afrique et Négriers, deux brûlots qui provoquèrent des réactions extrêmement violentes partout dans le monde.

Grâce à un savoir encyclopédique, les deux auteurs nous expliquent comment les prémices du genre étaient déjà présentes dès les débuts du cinéma. Le mondo est en fait une déviance du documentaire ethnographique, mixé avec une évolution glauque du film « sexy » qui présentait à l’époque d’innocents strip-teases de cabaret.

L’ouvrage est indispensable car il fait l’inventaire de films pas forcément connus. Le genre « mondo » est bien con

nu des amateurs de films de « genre » mais la liste des œuvres est bien plus longue que ce que l’on pouvait imaginer. Ce pavé de 350 pages, un colossal travail de recherche et d’analyse, semble définitif sur le sujet.

Si le sujet est pointu, l’ouvrage est assez didactique pour intéresser tous les cinéphiles. Et même si certains films sont à présent introuvables, les auteurs livrent des descriptions qui donnent une bonne idée de ce que l’on peut voir à l’image. De nombreuses photos noir et blanc accompagnent le texte.

Tout un chapitre est consacré aumondo américain, plus basé sur l’érotisme et l’humour potache et finissant par évoluer vers les films d’autodéfense et d’exécutions capitales.

Un chapitre s’intéresse aux œuvres des frères Castiglioni et leurs reportages sur les rituels des tribus d’Afrique.

De fil en aiguille, on arrive doucement au film de cannibales. Ceux-ci s’inspirent des mondo movies sur la forme, évoquant une certaine vérité à travers des images prises sur le vif. Le film le plus détaillé est bien sûr Cannibal Hocolaust, le maître étalon du film de cannibales, réalisé par Ruggero Deodato. Ce film a semé la confusion car il mélange des images réelles de massacre d’animaux, à des images trafiquées à l’aide d’effets gores pour la mort des journalistes, dévorés par les cannibales. Les auteurs passent rapidement sur les pâles copies, dont le fameux Cannibal Ferox et ses scènes atroces de mutilations.


A propos de Jérôme

toute-puissance mégalomaniaque, oeil de Sauron, assoiffé de pouvoir et d’argent, Jérôme est le father de big brother, unique et multiple à la fois, indivisible et multitude, doué d’ubiquité. Il contrôle Cinétrange, en manipulant l’âme des rédacteurs comme des marionnettes de chiffons. Passionné de guerre, il collectionne les fusils mitrailleurs. Le famas français occupe une place d’exception dans son coeur. C’est aussi un père aimant et un scientifique spécialisé dans les nouvelles technologies de l’information. Pour faire tout cela, il a huit doppel gangers, dont deux maléfiques. Il habite au centre du monde, c’est-à-dire près de Colmar.

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